ジルの友人ラウル・モンテロさんからのスピーチ、東京のお別れ会にて Speech from Mr. Raul Montero, at the farewell party in Tokyo 2016/06/19
(日本語訳は後に続きます。)
Bonjour, Reiko, merci pour nous avoir invité aujourd’hui.
Je me présente, je m’appelle Raul et je suis franco-venezuelien, j’ai connu Gilles à la SUGINAMI NIHONGO KAIWA NO KAI il y a presque deux ans, tous les deux nous étions étudiants de japonais. C’est au nom de notre NPO que je voulais partager quelques souvenir de notre cher Gilles. Je suis venu avec Maruta-san, Arima-san, Tasaka-san, Yamada-san, Diego...
Les mardis matin c’était le jour de notre cours. Gilles venait quand il n’était pas occupé avec son film et Yamada-san était son professeur. Apres les cours on déjeunait avec les autres amis : Diego, Marie-Liesse et Jonathan (qui ont demenagé à Paris mais qui sont de tout coeur aujourd’hui avec nous). Mais comme Gilles est un passionné apres manger il faisait un 2e cours l’apres-midi ! (et d’autres cours ailleurs !). Il voulait absolument maitriser cette langue car il avait besoin pour etre certain de pouvoir parler avec ses deux amours : Lili et Suzu qui grandissent chaque jour.
Chaque midi c’était pour nous l’occasion de se retrouver et de parler ensemble. C’est là où j’ai connu Gilles. Ce sont ces midis en terrasse à Koenji qui resteront dans notre mémoire : les discussions passionnées sur l’état du monde, l’amour qu’il portait pour ses filles, ses voyages incroyables autour du monde, son empathie et sa soif de connaitre les autres.
Nous avons pu suivre sa lutte pour pouvoir financer son projet et pour tourner le documentaire, l’admiration qu’il sentait pour Matsumura san et pour les habitants de Fukushima. Il parlait toujours passionnement, avec son coeur. La derniere fois qu’on a mangé ensemble c’était en Novembre de l’année derniere. Il était inquiet car il devait rentrer en Belgique pour finir son film : il avait des soucis avec les traducteurs et il devait respecter le calendrier. Mais au meme temps il était tellement excité, ses yeux brillaient, il aimait sincerement ce qu’il était en train de réaliser. Il a su suivre son reve !
Je voulais partager avec vous un poeme de Boris Vian, un poete francais du XXe siecle que je suis certain il devait aimer. Le poeme s’appelle L’Évadé et il parle de la liberté. Il s’agit de la course d’un homme dans un pays en guerre mais cet homme veut juste sa liberté. Cet homme refuse faire la guerre, il dit non à la violence :
L’Évadé
Il a dévalé la colline
Ses pas faisaient rouler les pierres
Là-haut entre les quatre murs
La sirène chantait sans joie
Il respirait l’odeur des arbres
Avec son corps comme une forge
La lumière l’accompagnait
Et lui faisait danser son ombre
Pourvu qu’ils me laissent le temps
Il sautait à travers les herbes
Il a cueilli deux feuilles jaunes
Gorgées de sève et de soleil
Les canons d’acier bleu crachaient
De courtes flammes de feu sec
Pourvu qu’ils me laissent le temps
Il est arrivé près de l’eau
Il y a plongé son visage
Il riait de joie il a bu
Pourvu qu’ils me laissent le temps
Il s’est relevé pour sauter
Pourvu qu’ils me laissent le temps
Une abeille de cuivre chaud
L’a foudroyé sur l’autre rive
Le sang et l’eau se sont mêlés
Il avait eu le temps de voir
Le temps de boire à ce ruisseau
Le temps de porter à sa bouche
Deux feuilles gorgées de soleil
Le temps d’atteindre l’autre rive
Le temps de rire aux assassins
Le temps de courir vers la femme
Il avait eu le temps de vivre.
Le poeme de Boris Vian parle des choix de tout humain, sans doute celui de Gilles : peut-on rester enfermé dans le camp sans joie des obligations sociales ou bien peut-on s’evader, profiter de la vie, poursuivre ses rêves et cueillir chaque petit bonheur : l’odeur des arbres, la lumière, sauter à travers les herbes, plonger son visage dans l’eau courante, rire de joie, courir vers la femme…
Et malgré la mort, le poème se termine sur une affirmation heureuse : "Il avait eu le temps de vivre."
J’essaie de dire que malgré que Gilles soit parti, malgré la tristesse et l’injustice de sa mort, nous devrions essayer d’etre heureux pour lui. Nous avons connu un homme plein de passion qui a vécu sa vie comme peu d’hommes ont eu le courage de le faire.
<日本語訳>(ブリュネ夫妻、ありがとうございました。)
脱走 (訳: 村上 香住子)
男は丘へ逃げていた
足の下では小石がころがる
あの小高い所では 四面の壁の中で
サイレンが よろこびもなく なりひびいている
鋳物のようなその身体で
木の香をかぐ
光が 男によりそい
男の影を とびはねさせる
私に 時間が残されていればいいが
男は草地を とびこえる
太陽と樹液がいっぱいになった
黄色い葉を 二枚ひろった
青い鋼の大砲が
かわいた砲撃の みじかい炎をはきだした
私に 時間が残されていればいいが
男は水のほとりにやってきた
顔を水につけ
うれしそうに笑ってのんだ
私に 時間が残されていればいいが
とび越えるために 立上がった
私に 時間が残されていればいいが
熱い真鍮のみつばちが
男を向う岸まで ふっとばした
水に 血が混ざった
男はそれをみる時間はあった
泉の水をのむ時間
太陽をいっぱいに含んだ 二枚の葉を
口元までもっていく時間
殺戮者に微笑む時間
向う岸まで着く時間
女の方にかけよる時間
彼には生きる時間があった
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ボリス・ヴィアン全集 9
ぼくはくたばりたくない
著者 ボリス・ヴィアン
訳者 伊東 守男 村上 香住子
(漢字等、原文ママ
みつばち 4字に点あり)